vendredi 11 avril 2014

Désolée, je suis enceinte...

[ Plus au jour d'aujourd'hui, mais il n'y a pas si longtemps... ]



       Cet article m'est assez compliqué. A dire vrai, il me trotte en tête depuis un moment, et outre le fait d'hésiter à le mettre en ligne, je suis on ne peut moins certaine de savoir poser les bons mots sur mon ressenti...
       Je vais quand même essayer...

       Il y a quelques jours, en lisant un article sur les essais-bébé d'une future jeune mère [ je balance tout, il s'agit d'Audrey ] m'est revenu le souvenir douloureux des réactions de ma sœur face à mes grossesses...

       Ma sœur et moi ne sommes pas en très bon terme, et ce depuis plusieurs années. Nous nous envoyons un texto trimestriel, et encore, je vois large. 

       Tout comme ma mère avant elle, lorsqu'elle et son compagnon décidèrent de créer une famille, elle dut subir une longue série d'échec avant d'être enceinte... De longs essais, durant de longs mois, elle allait de déception en déception. Le doute s'installa même d'y parvenir un jour. Alors ils firent leur batterie de tests, et ce n'en fut que plus perturbant : en théorie, tout allait bien...
       Un peu plus d'un an, et une fausse couche plus tard, enfin, elle avait deux locataires. 

       Malheureusement, un seul des deux survécu. Commença alors une grossesse dans l'angoisse, mais qui arriva à son terme sans autre embûche. Ma nièce naquit en octobre 2010 [ ça en jette le passé simple!] dans d'excellentes conditions, et elle est aujourd'hui une adorable fillette blonde comme les blés !

       Au cours de sa grossesse, il s'avéra que moi-même je tombai enceinte. 

       Lorsque l'Homme et moi avions décidé de faire « des essais », dans ma tête, c'était certain, galère il y aurait... Sauf que du premier coup... BIM ! Transformé l'essai. J'en demeurais pantoise ! 

       Ma surprise fut si vive, mon incrédulité si intense, que je me persuadai de ne pas y croire, m'attendant à un pire... Tant qu'un écran ne m'eut prouvé que la vie avait bel et bien prise en moi, rien, ni même les battements de son cœur ne me convainquit. [ enfin... Rien ne me convainquit qu'il n'y aurait pas de drame, comme toutes les mères j'aimais déjà la promesse au creux de moi...]

       Une fois les trois mois réglementaires écoulés, je fis mon annonce [ à d'autres que ma mère ], notamment à ma sœur. Et si sa grossesse m'avait été un tsunami émotionnel, une joie infinie et profonde, visiblement, la mienne la laissa de marbre. Une immense déception pour moi... 

       J'appris plus tard que mes théories, celles que j'avais échafaudées pour comprendre sa rudesse, étaient proches de la vérité. Elle m'en voulait clairement de ne pas avoir galéré, pensait secrètement que je lui volais la vedette, et que, au final, je ne méritais pas cette chance, moi, vilain petit canard...

       Ma fille naquit en mars 2011, soit 6 mois plus tard que la sienne.

       Quelques 18 mois plus tard, ma sœur reprit de nouveaux essais. Probablement avait-elle le souhait d'avoir des enfants rapprochés. Malheureusement, elle ne fit pas moins de quatre fausses couches, dont une lui manquant d'être fatale, en l'espace d'une année... 

       Et moi, de mon côté, en février j'apprenais ma seconde grossesse, non prévue [attention, prévue et désirée, deux choses distinctes!]

       Je compris sa tristesse, son amertume en cet instant [ celui où elle l'apprit ], en revanche, ce que je suis aujourd'hui toujours incapable de comprendre, ce sont ses reproches. Cette façon à elle de me faire penser : « je suis désolée, je ne l'ai pas fait exprès »

       Ces reproches encore présents aujourd'hui. Malgré la bonne farce que nous a fait Madame la Vie : sa première est d'octobre, ma première de mars suivant, mon second est d'octobre, sa seconde de mars suivant...

       Et j'en viens à un questionnement plus large

       Sommes-nous, nous mamans, séparées en deux catégories distinctes, celles qui ont souffert pour accéder à ce statut, et celles qui non ? 
       Devons-nous mener les guerres inutiles que peuvent causer l'allaitement, le portage, n'importe quelle différence ? 
       Une maman sans galère à l'être ne peut-elle ni comprendre, ni compatir, ni simplement souhaiter avec sincérité le bonheur à celle qui lutte ?


       Dois-je vraiment m'excuser d'avoir eu une chance que d'autres n'ont pas, simplement parce que ces autres, ces mères-mais-pas-officiellement, je les comprends, et j'ai envie de le leur dire ?


J'en profite au passage pour souhaiter tout le bonheur du monde à Audrey, et toutes ces autres qui essaient, coûte que coûte, de devenir enfin maman.

11 commentaires:

  1. Merci beaucoup pour ton message, je te souhaite aussi beaucoup de bonheur. Je dois avouer que je suis perplexe face à la réaction de ta soeur... Même si je n'ai pas (ou pas encore) galérer autant que ta soeur, je ne souhaiterais ça à personne et encore moins à ma soeur (même si je n'ai pas de soeur mais 3 frères ^^). Elle aurait du se réjouir pour toi. Donc non ne culpabilise pas et ne t'excuse pas <3

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    1. Merci Audrey <3 ça me rassure un peu, parce que d'un côté, je me suis imaginée à sa place, me suis imaginée le calvaire, mais de l'autre, j'ai juste envie de lui en vouloir de rester cloisonnée dans cette compétition débile... Surtout que du coup, je n'ai jamais vu mes nièces...

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  2. Ton article m'interpelle et me fait beaucoup de bien. J'ai connu les mêmes "interrogations" avec mon frère, qui a galéré à avoir son 1er enfant (et qui en a finalement eu 3 en 4 ans...) tandis que j'ai eu ma première fille "un peu par surprise" mais follement désirée. Je ne savais pas qu'il galérait, et tout le monde lui demandait "alors c'est pour quand?". Je ne crois pas qu'il m'en a voulu, mais moi je me suis sentie coupable...

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    1. C'est drôle, parce qu'en me sentant moi même "coupable", j'ai envie de te dire qu'il ne faut pas.. ! Faîtes ce que je dis... ;-)
      Comme le dit la chieuse juste en dessous, la nature est ainsi faite, et au final, cette culpabilité est stérile, parce qu'on n'y peut rien...

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  3. J'aime beaucoup ton article, j'aurais pu l'écrire mou-même, à quelques détails près ( pas de soeur mais des copines en grosse galère ! ). Moi aussi j'ai eu 2 enfants très facilement ( les 2 du premier coup ) et j'ai eu du mal à ne pas culpabiliser autour de moi. D'autant plus que sur une grosse majorité de blogs pma, les " en clok " en C1 en prennent pour le grade... Bref la nature est ainsi faite malheureusement.

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    1. ^^ Merci
      C'est justement ça, à plus "grande échelle" qui me cause souci... Cette guéguerre : celle qui ne galère pas n'est pas de mon clan, elle n'y comprend rien. Comme si, en quelques sortes avoir un bébé du premier coup nous enlevait notre humanité et notre réelle compassion (attention pas pitié !), alors qu'en vrai de vrai, on n'a pas "choisit" d'avoir de la chance...

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    2. Tout à fait d'accord, et quid du terme " grossesse précieuse" qu'on entend et lit de plus en plus ? Parce que nous, si on fait une FC c'est pas grave, le mois prochain on peut remettre ça...

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  4. J'aimerai te dire de ne pas culpabiliser mais moi même, das ton cas, je crois que je l'aurai fait ... et d'ailleurs, quant je suis tombée enceinte de ma dernière, surprise, elle aussi, de la vie, je n'ai pas voulu dire ni sur mon blog, ni dans mon entourage, que cette grossesse là, me chagrinait puisque, pas prévue aussi vite . J'aurai trouvé cela, indécent, culpabilisant et puis, finalement, j'ai osé le dire, que oui, les premiers mois, ce ne fut pas facile a accepté ...

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    1. Ou comment se gâcher un peu son bonheur parce qu'on fait trop attention à celui du voisin. Les gentilles personnes se retiennent de beaucoup de choses... Ici, passé le choc du "test", nous étions approximativement prêts. Effrayés, mais prêts. Du coup, je n'ai pas culpabiliser de ne pas l'accepter, mais de m'en réjouir, simplement...
      Cercle vicieux... Chaque communauté à ses genres de codes, et si la grande majorité n'y adhère pas, la minorité a, elle, la langue bien trop pendue (et les dents dehors)...

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  5. Ton billet m'interpelle car j'ai été dans le cas de ta sœur : j'ai mis très longtemps à avoir mon bébé. Je suis passée par des années de PMA tandis qu'autour de moi les mamans fleurissaient dans ma famille ou parmi mes amies. Tu n'as pas à culpabiliser, personne ne peut t'en vouloir de tomber enceinte facilement. C'est comme ça, c'est la nature. Heureusement que la majorité des couples n'ont pas à subir le problème de l'infertilité qu'on ne peut souhaiter à personne, sauf à faire preuve d'un égoïsme indécent. C'est vrai que c'est vécu comme une injustice mais il y a d'autres injustices en ce bas monde : des gens qui meurent jeunes et d'autres vieux, des malades et des bien portants, des riches et des pauvres... Pendant toutes ces années de galère, je n'en ai jamais voulu à personne et je ne voulais pas que ce problème change mon rapport avec les autres, m'éloigne d'eux ou fausse nos amitiés. Je préférais me concentrer sur ce que j'avais la chance d'avoir : un amoureux génial, une super famille, de bons amis, un job sympa, la possibilité de voyager et de m'offrir ce que qui me faisait plaisir... En revanche,l'annonce d'une nouvelle grossesse était toujours difficile à vivre même si extérieurement je n'en laissait rien paraître. J'éprouvais de la jalousie à en pleurer parfois mais c'était une jalousie de situation, jamais une jalousie nominative vis à vis de quelqu'un qui n'était pour rien dans ma propre histoire à la maternité. Et puis je savais que mes amies enceintes culpabilisaient en ma présence et je leur étais reconnaissante d'éviter certains sujets ou de vouloir me ménager même si je ne leur demandais rien ! Il y a certes deux catégories de personnes, mais pas celles que tu distingues : il y a les mamans et puis celles qui aimeraient et qui n'y arrivent pas. On n'oublie jamais les années de galère et je pense qu'on ne peut vraiment comprendre une situation que quand on l'a vécue. Mais ce n'est pas parce qu'on a eu la chance de ne pas vivre une situation difficile qu'on ne peut pas éprouver de la compassion pour les autres. Je ne comprends donc pas la réaction de ta sœur qui au final a eu, elle aussi, des enfants. La seule chose qui m'était (et qui continue à m'être) insupportable, ce sont les futures mamans qui se plaignent à longueur de temps et à qui veut bien l'entendre de leurs petits maux de grossesse : des nausées, fatiguée, mal de dos, sciatique... Car j'aurai tout donné pour avoir ces petits maux quand je subissais échecs après échecs. J'aurais compris que ta sœur désire s'éloigner pour se protéger si tu avais eu des enfants et, encore une fois, tu n'aurais pas eu à culpabiliser. Mais dans son cas, non je ne comprends vraiment pas...

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    1. Ton message me touche beaucoup... Je me sens un peu rassurée parce que j'ai eu le sentiment d'avoir mal agit. Mon cerveau avait beau me signifier le contraire, je me sentais coupable... Pour ma première, à l'annonce, j'étais loin d'imaginer qu'elle réagirait ainsi, sa grossesse se déroulait bien, sa fille allait bien, je pensais naïvement qu'on pourrait éventuellement se rapprocher un peu...
      J'en suis même, à certains moments venue à me demander s'il n'aurait pas fallu que j'attende qu'elle accouche.. :-/

      Pour mon second, j'ai mis toutes les formes, j'ai fait une annonce rapide, sans trop d'enthousiasme mal placé... Je voulais juste qu'elle l'apprenne de ma bouche, pas par intermédiaire... Et, re badaboum...
      Bref...

      Je te rassure, les futures mères plaintives m'agacent aussi, que l'on se sente mal, soit, mais de là à venir pleurer d'être dans l'état que l'on a (en général) choisi... Ça me dépasse aussi...

      En tous cas, merci de ton témoignage, ça me touche beaucoup <3

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